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Chroniques

MARIA CHAPDELAINE

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Commentaire sur le film MARIA CHAPDELAINE de SÉBASTIEN PILOTE
« François Paradis regarda Maria à la dérobée, puis détourna de nouveau ses yeux en serrant très fort ses mains l’une contre l’autre. Qu’elle était donc plaisante à contempler! D’être assis auprès d’elle, d’entrevoir sa poitrine profonde, son beau visage honnête et patient, la simplicité franche de ses gestes rares et de ses attitudes, une grande faim d’elle lui venait et en même temps un attendrissement émerveillé, parce qu’il avait vécu presque toute sa vie rien qu’avec d’autres hommes, durement, dans les grands bois sauvages ou les plaines de neige. Il sentait qu’elle était de ces femmes qui, lorsqu’elles se donnent, donnent tout sans compter : l’amour de leur corps et de leur cœur, la force de leurs bras dans la besogne de chaque jour, la dévotion complète d’un esprit sans détours. »
Maria Chapdelaine (roman), Louis Hémon, Éditions JCL, 2013, p. 125-126

« Alors une troisième voix plus grande que les autres s’éleva dans le silence : la voix du pays de Québec, qui était à moitié un chant de femme et à moitié un sermon de prêtre.

Elle vint comme un son de cloche, comme la clameur auguste des orgues dans les églises, comme une complainte naïve et comme le cri perçant et prolongé par lequel les bûcherons s’appellent dans les bois. Car en vérité tout ce qui fait l’âme de la province tenait en cette voix : la solennité chère du vieux culte, la douceur de la vieille langue jalousement gardée, la splendeur et la force barbare du pays neuf où une racine ancienne a retrouvé son adolescence. »

Idem, p. 144
MARIA QUI FUT POUR LE QUÉBEC DE NOS ANCÊTRES CE QUE FUT MARIE POUR LA TRADITION CHRÉTIENNE
Texte dédié à mes grands-pères : Prudent, bûcheron dans les forêts du Québec et Raoul, chercheur d’or sur le plateau du Klondike
Dans le journal Le Devoir du 10 juillet dernier, la journaliste Carole Montpetit nous parle du « Festival Montréal » qui était en cours, un festival « 100 % local », et du cirque Alfonse qui y présentait son spectacle Animal en ouverture. Elle nous apprend que ce cirque Alfonse a vu le jour dans une grange de la maison parentale et qu’il n’a jamais eu d’autre ambition que d’être fidèle à lui-même et à ses racines. Tantôt s’inspirant des camps de bûcherons, tantôt des hommes forts à la Louis Cyr, et tantôt du monde religieux ancestral. Et ensuite d’ajouter : « Si certains Québécois peuvent oublier leur histoire malgré la devise “Je me souviens”, les circassiens de Lanaudière [figurants du cirque] sont là pour raviver leur mémoire. »

Le prolifique cinéaste québécois Jean-Claude Labrecque (décédé en 2019), bien connu pour avoir filmé « Vive le Québec libre! » lors de La visite du général de Gaulle au Québec en 1967, ainsi que le « Speak White » lu par la poétesse Michèle Lalonde à l’occasion de La Nuit de la poésie du 27 mars 1970, fut habité tout au long de sa carrière par une sorte de devoir de mémoire. En 2015, il réalisa pour le compte de l’ONF le long métrage documentaire Sur les traces de Maria Chapdelaine, qui retrace l’étonnante entreprise cinématographique du réalisateur français Julien Duvivier venu tourner en 1934, dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, la première version filmique du roman Maria Chapdelaine de Louis Hémon.

Quel magnifique récit que ce roman qui relate pour certains « la plus belle histoire d’amour » que l’on puisse imaginer, et pour d’autres un émouvant compte rendu de ce qu’ont vécu nos ancêtres québécois au quotidien, déterminés, comme l’écrit Hémon, « à faire de la terre » – expression du terroir – « à tout ce qui gît de travail terrible entre la pauvreté du bois sauvage et la fertilité finale des champs labourés et semés », soit ce qui fut le lot de Maria et de tous les membres de la famille Chapdelaine. Une histoire que rédigea en 1913, paisiblement et anonymement, Louis Hémon, pendant ces dix-huit mois où il vécut à Saint-Édouard de Péribonka, en pleine zone forestière, dans le voisinage des Bédard et des Bouchard qui lui ont servi de modèles pour les personnages de son roman. Habitants de Péribonka que Labrecque eut l’heureuse et généreuse idée d’interroger dans la personne de quelques-uns de leurs descendants. Une histoire qui devint, à la suite de sa publication en  1916, le premier roman de la terre à être acclamé mondialement, devenu un classique de la littérature québécoise…

…Et une histoire que Sébastien Pilote n’a pas hésité à produire à nouveau à l’écran, avec le souci d’être minutieusement fidèle à tout ce qui est relaté dans le roman de Louis Hémon. À titre d’exemple, dans les versions cinématographiques antérieures de Maria Chapdelaine, les actrices personnifiant Maria étaient plus âgées que celle du roman, une jeune fille de dix-sept, dix-huit ans. Ainsi, dans le film de Gilles Carle de 1983, elle en avait 30, sous les traits de la belle Carole Laure. Dans le Maria Chapdelaine de Pilote, que l’on ne se gêne pas de qualifier de l’une des plus belles réalisations cinématographiques produites au Québec, il n’y pas que Maria qui est le centre de l’attention, mais également tous les membres de sa famille. Ce que psychologiquement nous pourrions traduire par « ce n’est qu’ensemble que, solidairement, nous parviendrons à rendre féconde une terre menacée d’infertilité ».

Lectrices et lecteurs de cette chronique, une question en ce qui a trait aux trois choix de prétendants auxquels Maria se trouve confrontée dans le roman, à savoir : François Paradis, coureur des bois, épris des grands espaces et de liberté, Lorenzo Surprenant, décriant la vie sur la terre des colons canadiens-français et personnifiant le rêve américain, puis Eutrope Gagnon qui, lui, adore le travail de la terre et représente tant la résignation que la continuité. Quel choix feriez-vous, un siècle après le récit de cette histoire, laquelle, paradoxalement, fut écrite par un Français de passage au Québec, à l’instar de l’exceptionnelle biographie Le Rêve de Champlain que l’on doit à l’historien américain David Hackett Fischer? Comme si, pour saisir l’autre en profondeur, il fallait l’attentif recul de l’observateur étranger. Quelles sont les valeurs et les facteurs qui conditionnent, à l’époque actuelle, vos choix amoureux? |
 


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CItation

« Après avoir fait courir les cinéphiles de Québec pendant 25 ans, l’heure est maintenant aux adieux pour les Rencontres Ciné-Psy. Un total de 125 rencontres ont eu lieu à travers toutes ces années, dont certaines ont mis en vedette des journalistes du Soleil.

 

C’était devenu une vénérable institution pour les amateurs de long métrage dans la Capitale-Nationale. «On avait des gens qui venaient à toutes les Rencontres, c’était de véritables fidèles», confie Marcel Gaumond, celui qui est derrière le projet depuis le tout début.

[...]

La formule des Rencontres était toute simple. Il s’agissait de réunions où l’on débattait d’un film et des enjeux qu’il soulève. La discussion tournait non seulement autour d’un long métrage, mais était aussi nourrie des propos d’un conférencier.

[...]

L’idée de génie lui est venue lors d’un souper avec le directeur du cinéma Le Clap de l’époque, Michel Aubé, en 1995. L’étincelle n’a pas été causée par les réminiscences des auberges de Zurich, mais bien par des souvenirs ancrés ici, sur le chemin Sainte-Foy. «Quand j’avais 19 ans, on avait fondé une boîte à chansons où il y avait eu non seulement des chanteurs, mais des expositions artistiques, du théâtre, etc. [...] Alors je dis à Michel, qu’est-ce que tu dirais si on faisait des rencontres, mais sous forme de discussions qui porteraient sur des films ?» raconte M. Gaumond. Des réunions à saveur artistique comme celles qui avaient lieu dans les boîtes à chansons, auxquelles on ajoute les discussions chaleureuses des auberges de montagne, voilà qui en faisait une idée très originale.

 

Semble-t-il qu’elle n’était pas trop éclatée pour M. Aubé, puisqu’il aurait tout de suite accepté l’offre. Ce fut un choix judicieux, car les Rencontres sont devenues très populaires au fil du temps. [...] »

 

Extraits de l’article « Les rencontres Ciné-Psy auront duré un quart de siècle »